Chacun de nous, qu'on l'admette ou non, dans ses activités ou passions favorites, a certainement un objet, une phrase, un rituel de « bonne chance » : le joyeux vêtement des examens universitaires, le trèfle à quatre feuilles dans le livre, le croc de ce tal verrat, la phrase habituelle avant de démarrer une entreprise, passer sous ce pont particulier avant un événement, etc. J'ai connu un homme qui, s'il entendait « bonne chasse » alors qu'il se mettait en marche avec le fusil sur l'épaule, il changeait d'avis aussitôt et rentrait chez lui. La superstition est beaucoup plus répandue qu'on ne le pense, même parmi les gens les plus rationnels. Il est probablement omniprésent parmi les chasseurs, qu'il avoue ou non. Il y a des signes considérés comme de mauvais augure, d'autres propices. Pour ma prédisposition naturelle, je ne suis pas enclin à considérer la première alors que je suis plus attentif aux signes de chance. Comme souvent, ma bonne étoile se cachait derrière une constellation d'événements pour ainsi dire "malheureux".
Nous sommes en fin de saison de chasse. Le mois dernier, y compris le samedi précédent, le destin s'était moqué de moi en faisant en sorte que, une fois à ma droite, une fois à ma gauche (parfois même les deux !) les poteaux à côté du mien renversaient un ou plusieurs sangliers sans même avoir eu l'occasion d'apercevoir un poil. Cela ressemblait à un sort maléfique !
Quand j'arrive à mon poste, je vois les autres amis passer devant moi se diriger vers le fossé et je les salue avec un sincère "Bonne chance!". Je commence à observer le trot que je dois parcourir : il est battu, mais pas tant que ça. Pour améliorer la vue, j'ai coupé quelques brindilles feuillues avec un sécateur, une habitude apprise des blagues dans le maquis dur de la Maremme et, toujours en l'honneur des pratiques de la Maremme, je contrôle la direction du vent, acteur secondaire mais décisif dans le chasse au sanglier. Je suis dans le bon vent, heureusement ! J'enlève du sol les feuilles sèches qui risquent de dénoncer le moindre mouvement de mes pieds. Je pose l'étui à fusil sur la branche d'un chêne vert et allume mon Aimpoint en ajustant l'intensité du point rouge en fonction de la lumière présente.
Lorsque les chiens lâchent, le repas du matin est immédiatement trouvé par leurs truffes et après une approche rapide, un aboiement tonitruant à l'arrêt signale la découverte des animaux. Le premier canizze tête en bas, le long du fossé, et c'est là que les premiers sangliers sont arrêtés. Alors que je me tortille dans ces pensées stériles, mon attention est attirée par le rouge pointillé noir d'une coccinelle aux yeux vermillon, à côté du champ de cordura vert du fourreau de mon fusil. Je la soulève doucement sur l'index et, dans un face à face silencieux et drôle, je lui dis dans mes pensées "On dit que ça porte bonheur : alors, allez ! Aujourd'hui, c'est votre chance de le prouver!« Je place la coccinelle sur la feuille d'un chêne vert. Quelques minutes rapides passent. "Crack!Un bruit suspect attire mon attention. Je ne sais pas ce que c'est, ça pourrait être un sanglier, mais je ne peux pas exclure que ce soit un chien, bien que tous les chiens de l'équipe portent des cloches autour du cou. Après quelques instants un autre "crack!" et, aussitôt, dans l'épaisseur du maquis, une ombre. Dès qu'il pénètre dans le cône de visibilité que j'ai découpé dans les branches, le sanglier se profile. La balle 30.06 crachée par le Barre Browning Tracker Pro HC clouer l'animal en place. Alors qu'à la radio les canai demandent quels chiens étaient sur la piste du sanglier arrêté, je commence à entendre les chiens et en un rien de temps les trois auxiliaires rejoignent l'animal pour se venger. "Alléluia !" Je me réjouis entre moi et moi"Le malheureux carrousel de blagues absurdes où la chance est venue me toucher sans jamais être attrapée s'est enfin arrêté ! ».
Pris comme un instinct d'enfant pour aller remercier la coccinelle, je ne la retrouve plus sur la feuille où je l'ai laissée. Ce n'est qu'au bout d'un moment que je la vois à côté de la douille, comme pour revendiquer, petite et raide, son influence magique sur le succès de cette journée de chasse.